Pascal LAPORTE
Finales
Biographie
Né à BORDEAUX, le 13
avril 1876, quelques jours avant le jour de Pâques, Pascal LAPORTE est l’homme
qui a marqué le plus le passé sportif bordelais et nantais. Il est
l’instigateur du développement du sport dans notre région. Le sport est pour
lui une seconde nature, une façon de vivre et un comportement social. En cela,
il est bien le portrait type du « sportif de la première génération »,
éclectique, à l'image de plusieurs pionniers parisiens du RACING CLUB DE FRANCE
et du STADE FRANÇAIS. Dans sa conception du sport, il y a aussi du Pierre DE
COUBERTIN dans cet homme. «[…]
Âgé de 19 ans, P.
LAPORTE a commencé brillamment ses succès sportifs, en 1894, en gagnant le
championnat de vélocipédie du Sud-Ouest, titre qu'il ne put conserver cette
année, ses occupations ne lui permettant plus un entraînement sérieux, et il
dut céder la place, curieuses coïncidences, à son camarade TERIGI, un autre
stadiste parti avec lui en ANGLETERRE. Footballeur remarquable, il a joué comme
arrière dans le match du RACING CLUB contre le STADE BORDELAIS et nos amis du
RACING se rappelleront probablement cette figure sympathique. Capitaine de
l'équipe première du STADE BORDELAIS pendant l'année 94-95, P. LAPORTE a
conduit son équipe à la victoire dans les Championnats du Sud Ouest. (Rugby et
Association). Champion de natation vitesse pour l'année 1895, le jeune stadiste
a gagné brillamment cette année le championnat d'athlétisme du STADE BORDELAIS
et a enfin ajouté à ses titres nombreux celui de champion d'athlétisme du
Sud-Ouest ; ce fut avant son départ, sa dernière victoire sur le sol français.
[…]. Zaide. » (1) « Entré au STADE BORDELAIS, il en fut vite un des joueurs les
plus enthousiastes et, malgré son jeune âge, l'animateur de ce club, qui devait
devenir la véritable école du rugby français. » (2)
En 1895, le STADE
BORDELAIS élit son président : un franco-écossais, J.S. SHEARER qui est agent
général pour la FRANCE d’une compagnie de navigation HUTCHINSON. Il restera 20
ans président de ce club et donnera une véritable identité. Il emploie aussi un
fils HUTCHINSON. Son dynamisme et son talent de meneur d’hommes sont très vite
repérés par SCHEARER. La vie lui a appris à se battre, car il est orphelin de
père et de mère et après l’obtention de son baccalauréat, SCHEARER l’embauche
dans sa société.
De 1895 à 1897, il
lui propose d’aller se former en ANGLETERRE, à LIVERPOOL pour l’aider à
progresser dans son jeu de rugby, mais aussi professionnellement chez son
employeur l’entreprise HUTCHINSON pour se former au droit maritime. Pendant
deux ans, outre ses études, il s’inscrit au club LIVERPOOL OLD BOYS, équipe
composée des anciens élèves du Collège de LIVERPOOL. Il jouera avec deux futurs
internationaux anglais (A. BRETTARGH et R.D. WOOD). Il est certainement un des
premiers Français ayant joué dans une équipe anglaise. " Il fut le
meilleur trois-quarts aile du LIVERPOOL FOOTBALL CLUB" (3) Dès son retour
à BORDEAUX, il est nommé capitaine. Il gardera son capitanat pendant huit
saisons consécutives.
En 1901, le STADE
BORDELAIS et le BORDEAUX UNIVERSITÉ CLUB fusionnent, dont il est un des
artisans, pour donner le STADE BORDELAIS UNIVERSITÉ CLUB (SBUC). Le club des
étudiants, malgré leurs enthousiasmes, manquait cruellement de moyens matériels
et financiers. LAPORTE retiendra beaucoup de choses de cette période. Il écrit
alors son plus beau palmarès sportif. " […] Il fut promu capitaine du
stade bordelais, capitanat qu'il sut conserver huit saisons consécutives, au
cours desquelles il réussit à constituer le plus beau palmarès dont puissent
s'enorgueillir une équipe et celui qui la commande. Dès 1899, en effet, le
STADE BORDELAIS est Champion de FRANCE, battant le STADE FRANÇAIS par cinq à
trois ; en 1900, après une débâcle, leur assigne l'écrase par 37 à trois, avec
les LANNES, RACHOU, DUFOURCQ, MOYZES ; 1901 voit la nouvelle victoire des
Bordelais par trois à zéro, mais ils sont disqualifiés, au bénéfice du STADE
FRANÇAIS ; puis le RACING, en 1902, les bat à nouveau par six à zéro. Mais
arrive 1904, et dès lors, quatre saisons de suite, le STADE BORDELAIS, battant
toutes les équipes qui lui sont opposées, ne remporte que des victoires. C'est
toujours le triomphe du Lion à gueule noire : 1904, 1905, 1906, 1907, et,
coïncidence curieuse, toujours en face de son vieux rival, le STADE FRANÇAIS.
Pascal, aimé de ses hommes, avait toute leur confiance ; c'est l'époque des
gloires du rugby, qui ont pour nom : MARTIN, TILH, LEUVIELLE, MASSE, DUFOURCQ,
LACCASSAGNE, le prestigieux demi. Il ne croyait pas à la défaite. […]" (4)
Sa direction lui
demande de créer, à NANTES, une agence maritime au 79 quai de la Fosse. "
Il avait avec le ROYAUME UNI des liens étroits d’amitié et de travail puisque
sa nomination comme chef de ligne dans le port de NANTES pour la Société de
navigation HUTCHINSON l’avait porté à ajouter à ce poste plusieurs agences de
négoce : charbons de CARDIFF, pneus India and Avon, etc.. et le fit ainsi
s’associer avec le colonel James HUTCHINSON, fils de son premier patron."
(5)
Sa rencontre avec
Charles BERNARD, son ancien capitaine adverse de la première finale sera des
plus importantes car l’élément déclencheur de la naissance de son club. Il
attire à NANTES ses camarades bordelais : GALLIOT, LACCASSAGNE, TILH,
HOURDEBAIGHT et le prestigieux Gallois Percy BUSH. Il sera le capitaine du SNUC
pendant deux ans avant de céder son brassard à l’arrivée de Percy BUSH et de
raccrocher ses crampons d’équipier premier. Mais on ne quitte pas un pré vert
comme cela. Avec son ami Yves THOMAS, il sera le créateur et l’animateur de
l’équipe vétérans dont il hérite de fait le capitanat. En 1912, il est nommé
Chevalier du Mérite Agricole.
Durant la guerre
1914-1918, il est mobilisé et affecté au port de NANTES, en qualité d’officier
Capitaine chargé de l’inspection des denrées et de matériaux. Pour ses services
de guerre, il est décoré de l’ordre British Empire. Dans les années vingt, Pascal
LAPORTE est un des grands notables de NANTES. Il est président du S.N.U.C.,
président du Comité de l'Atlantique de rugby et de la Société d'encouragement
aux Sports de l'Ouest. Lorsque la Fédération Française de Rugby est créée en
1920, la presse parie que le futur président sera Pascal LAPORTE mais il n’en
deviendra que le Vice-Président. Il est fait Chevalier de la Légion d’honneur
(JO du 7 décembre 1923) au titre de l'éducation physique et sportive. La
création du Stade multisport de Malville est due à son initiative et est son
œuvre. Dans les moments difficiles, il n’hésite pas à sortir le carnet de
chèques ce qui à faire dire à sa femme : "Avec l’argent que tu donnes pour
ton SNUC, on aurait pu s’offrir une deuxième maison." (6)
Durant la guerre
1939-1945, il ne restera pas inactif et participera à quelques actes de
résistance. En août 1941, Pascal LAPORTE a négocié avec la Standort
Kommandantur afin que le stade Malakoff soit libéré pour les réunions sportives
en échange, il fut contraint d'accepter la présence d'une DCA sur le terrain de
Malville. (7)
Jusqu'en juillet
1940, les Anglais sont très présents à NANTES. Pascal LAPORTE, bilingue, joue
un très grand rôle dans cette période : Il rendit "[…] de grands services
à l'Ordonance WORK à NANTES qui avait mission d'assurer le ravitaillement de
l'Armée Anglaise en FRANCE. Lors de l'invasion, il refusa de s'incliner
définitivement devant le fait accompli et, mettant tous ses espoirs dans un
redressement de la situation par les Armées Alliés, il fut certainement un des
premiers résistants parmi les Nantais. […]" (8) Pendant toute
l'Occupation, il reste ferme, si ferme, qu'il fût désigné comme otage (9) par
les Allemands. Il souffre cependant des bombardements alliés de septembre 1943.
Son domicile, rue Racine, dans le quartier Graslin, son bureau, quai de la
Fosse, le siège du club, rue Santeuil et le stade de Malville sont détruits ou
gravement endommagés.
En 1944, il se
retire de la présidence du SNUC. Trois ans plus tard, le 6 avril 1947, il
succombe à la maladie et s’éteint, à l’âge de 71 ans.
Ironie du sort,
c’était le jour de Pâques. Il est resté 18 ans président de son cher club au
propre comme au configuré. Son œuvre perdure, car son nom est associé pour
toujours à son stade chéri : le stade Pascal LAPORTE.
(source : Hervé
PADIOLEAU, historien du STADE NANTAIS, que nous remercions tout
particulièrement) (1) Article paru dans la presse spécialisée de l'U.S.F.S.A.
(Les sports athlétiques) octobre 1895.
(2) "Miroir des
Sports" n° 180 du 13 Décembre 1923.
(3) "Miroir des
sports" n° 180 du 13 Décembre 1923. Erreur il s’agit du LIVERPOOL OLD BOYS.
(4) "Miroir des
sports" n° 180 du 13 Décembre 1923.
(5) Propos
recueillis auprès de sa fille Mme FLATRES le 23 avril 1999.
(6) Propos
recueillis auprès de sa fille Mme FLATRES le 23 avril 1999.
(7) Elle était
installée sur le deuxième terrain dédié au football.
(8) Hommage de Sir
Colonel J.H.R. HUTCHINSON membre des services secrets britanniques, associés et
amis de P LAPORTE à son décès. 1947.
(9) Précision de
Sylvie BOSSY-GUERIN, doctorante en histoire contemporaine : "Les otages
sont désignés parmi les personnalités de la ville ce qui est son cas, cela n’a
rien à voir avec une quelconque action de résistance. Des listes étaient
établies sans que l’on sache parfois qu’on y était. Face à l’occupation des
terrains de sport par les Allemands, plusieurs présidents de clubs essaient de
négocier pour obtenir quelques concessions permettant de jouer ou de
s’entrainer."
NANTES
