François CASALA-TROUSSILH
Biographie
10 novembre 1935. Derby basque chez les Juniors. BAYONNE affronte BIARRITZ sur le terrain de HARDOY à ANGLET. En cours de partie, HEDEMBAIGT joueur de BAYONNE, aplatit dans l’en-but et l’arbitre ordonne un renvoi aux 22. Deux joueurs biarrots ne stoppent pas leur course et frappent au sol le joueur bayonnais à coups de pied. Une riposte en entraîne une autre et une immense bagarre générale mêlant joueurs et spectateurs est déclenchée. Après quelques minutes, tout rentre dans l’ordre.
Mais un joueur ne se relève pas. Il s’agit du biarrot François CASALA-TROUSSILH, 19 ans, clerc d’avoué dans l’étude de Maitre RIBETOA à BAYONNE (1). Il évolue dans l’équipe avec son frère Bernard Gratien Georges (12/09/1917 à BIARRITZ - 02/03/1995 à CAMBO-LES-BAINS). Les médecins présents se précipitent à son chevet et constatent qu’il est inanimé et présente une gonflement anormal de la carotide. Il est immédiatement transporté en urgence dans une clinique de BIARRITZ mais il ne reprendra jamais connaissance. Il meurt le 12 novembre. L’autopsie révèle une compression du bulbe rachidien provoquée par plusieurs coups violents à la partie inférieure de la tête. Ses obsèques ont lieu le 15 novembre à BIARRITZ en présence d’une foule considérable.
Le parquet de BAYONNE charge les gendarmes de procéder aux interrogatoires des deux équipes. Certains joueurs biarrots désignent rapidement un joueur adverse : le deuxième ligne Charles LARRAN, 19 ans, cantonnier à la Compagnie du Midi (ancêtre de la SNCF) et résidant rue Maubec à BAYONNE (2). Entendu par le juge d’instruction Maître MAS, celui-ci l’inculpe de « coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner ». Cette inculpation est-elle dictée sous la pression de Me D’UHALT, juge d’instruction à BORDEAUX et beau-frère du jeune CASALA ? Il faut aussi se rappeler que cinq ans auparavant, l’affaire TAILLANTOU/PRADIE avait secoué le mundillo ovale. L’étau se resserre autour de Charles LARRAN qui se dit innocent. Fin novembre, désespéré, il tente de se suicider en se jetant dans l’Adour depuis le pont Saint-Esprit. Il faut attendre le 16 janvier 1936 pour qu’une reconstitution soit effectuée sur le terrain angloy, en présence notamment de l’arbitre de la rencontre, le bayonnais Alexis ETCHEGOYEN, cafetier à BAYONNE. Le coup de pied déclencheur sur HEDEMBAIGT semble moins intentionnel que prévu. De nombreux témoins de la scène sont présents : MM. ARMENTIA, juge de touche, le Dr POSTEL, spectateur, M. Charles GARAT et M. Emmanuel GARAT. Ces cinq témoins biarrots affirment avoir vu LARRAN frapper délibérément CASALA.
Côté bayonnais, personne n’a vu Charles LARRAN s’en prendre à François CASALA. Eugène BILLAC, ancien international, a vu CASALA s’écrouler seul, loin de toute action. TASTET, joueur de l'Aviron, jure avoir vu LARRAN se battre loin de CASALA. De nombreux autres témoins sont interrogés. En résumé, les biarrots assurent avoir vu LARRAN, surnommé « LE ROUQUIN », frapper CASALA. L’argument redondant était que sa couleur de cheveux l'identifie facilement. Les Bayonnais, eux, ont vu CASALA s’écrouler mais assurent ne pas avoir vu l’auteur du coup fatal. Le 24 novembre 1936, Charles LARRAN, est jugé en cour d’assises à PAU. Les témoins se succèdent à nouveau à la barre et maintiennent leurs dires. Les comptes sont faits : six personnes sur les soixante témoins ont vu Charles LARRAN frapper François CASALA. Le capitaine des Juniors biarrots affirme que lors de son duel avec LARRAN, CASALA était déjà au sol. En revanche, tous sont formels : François CASALA n’a absolument pas pris part aux incidents. D’un caractère calme et très posé, il s’était tenu à l’écart. François CASALA est décédé d’un coup porté sans aucune provocation de sa part.
En raison des doutes qui planent sur l’affaire et de témoignages contradictoires, le substitut Me RODIER-TALBERE prononce l’acquittement de Charles LARRAN. Lors de l’audience civile, la Cour déboute la famille CASALA-TROUSSILH qui réclamait 100.000 francs. Charles LARRAN disparaît quelque temps du paysage rugbystique et réapparaît dans l’équipe de CÔTE BASQUE XIII au tout début des années 40, composée de nombreux internationaux.
(1) Il demeure rue Sully Villa Eugénie à BIARRITZ. Son père Jean-François, né le 5 février 1882 à BEDOUS (Pyrénées-Atlantiques) et décédé le 30 aout 1963 à BIARRITZ, est préposé des Douanes. Sa mère, nommée Thérèse-Eugénie BARROUILLET dit BERGE, née le 26 juin 1885 à ARETTE (Pyrénées-Atlantiques) et décédée le 21 février 1971 à BIARRITZ, est couturière. François CASALA TROUSSILH avait également une sœur Marie-Jeanne, née le 28/03/1907 à BIARRITZ et décédée le 04/12/1989 à GRADIGNAN (Gironde), qui était la femme de Maître D'UHALT.
(2) Né le 16 mai 1917 à BAYONNE, Charles LARRAN meurt le 1er janvier 2006 à CAMBO-LES-BAINS à l’âge de 88 ans.
(Sources : recherches FinalesRugby : Gallica - Retronews)